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Dr Malick Diop : Du pharmacien derrière le comptoir à la promotion des exportations

PROFIL – Edition n°9 – Septembre 2021

DR MALICK DIOP

PHARMACIEN – DU COMPTOIR… A L’ASEPEX



TOUT EST POSSIBLE POUR LE PHARMACIEN

Sorti de la Faculté de médecine de pharmacie et d’odontostomatologie de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) en 1998, Dr Malick Diop, connu dans le monde de la politique, est un pharmacien. Ne s’étant pas contenté de ce parchemin, il décroche en 2000 un DESS en administration publique des affaires avant de se rendre à l’Ecole nationale d’administration (Ena) de Paris où il fait une formation de 3 ans. Après plusieurs voyages dans la sous-région, il décide finalement de revenir au pays et d’ouvrir son officine de pharmacie en 2003. Ancien maire de la commune de Fann-Point E-Amitié, responsable politique au sein de l’Alliance des forces pour le progrès (Afp), Dr Malick Diop est présentement le directeur de l’Agence sénégalaise de promotion des exportations (ASEPEX). Dans cette interview exclusive accordée à Médical Actu, le pharmacien fait une analyse longitudinale de la pandémie à Covid-19, diagnostique les maux de la profession pharmaceutique et invite ses pairs notamment les plus jeunes à ausculter d’autres filières.

TDR DE COVID DANS LES OFFICINES

Pour le docteur Malick Diop, il faut relativiser en ce sens que le pharmacien est d’abord le dispensateur de médicaments qui est un acte médical très important. Dans la mesure où lorsqu’il s’agit d’un produit du tableau, Dr Diop a déclaré : «  le pharmacien a la revue de tout ce qui est régularité prescription et il prend en charge naturellement la dispensation ». Dans ce sens, il reste favorable que les tests  de diagnostic rapide de Covid ont leur place dans les officines car dans le cas de la Covid, la pharmacie étant une structure de proximité, le pharmacien devrait entrer dans ce cadre de diagnostic qui pourrait permettre aux populations de connaître très rapidement leur statut en vue d’une meilleure prise en charge. « L’acte qui tourne autour du diagnostic de la pathologie à coronavirus à savoir les tests de diagnostics rapides sont des tests présomptifs mais définitifs. Il est donc important de les généraliser comme l’ont fait certains pays tels que la France », a laissé entendre Dr Malick Diop. Et de poursuivre : « Au Sénégal, l’institut pasteur est en train de travailler sur la mise à disposition des TDR le plus largement possible et de mon point de vue c’est le moment idéal pour que les pharmaciens jouent leur rôle dans le cadre de cette pandémie. D’autant plus quele pharmacien est au début et à la fin de toute sorte de pathologie. »

L’implication des pharmaciens dans la vaccination anti-Covid

Dans la campagne de vaccination anti-Covid qui entre dans le cadre de lutte contre la pandémie de coronavirus, le docteur Malick Diop par ailleurs membre de la coalition Benno Bokk Yaakar, de la mouvance présentielle demande au gouvernement sénégalais de faire plus confiance au pharmacien qui demeure un acteur de santé incontournable.  Un appel pour l’implication de cette profession dans la campagne de vaccination. « C’est un peu mitigé et ce qu’il faut retenir, le pharmacien peut jouer un rôle encore plus important. Si étant donné qu’il y a plus de 1000 pharmacies réparties dans les 45 départements du Sénégal et que le pharmacien étant donc au début et à la fin de toutes les pathologies, il devrait jouer un rôle important dans cette pandémie. Toutefois, il ne peut pas jouer un rôle qu’on ne lui confie pas », a-t-il renseigné.

Les pharmaciens appelés à casser la chaine de contamination à travers la sensibilisation

Beaucoup de décès liés à la pandémie du coronavirus sont aujourd’hui notés au Sénégal dans cette troisième vague marquée par le variant Delta qui se propage plus vite que les précédents existants dans le pays. Pour le docteur Malick Diop, plus on aura une augmentation du nombre de cas, plus il y aura des difficultés à les prendre en charge. « A partir de ce moment, le pharmacien peut jouer d’emblée un rôle dans la sensibilisation à travers le port de masque, le respect des mesures barrières mais surtout le premier diagnostic. Si vraiment les symptômes sont là, que la personne puisse se rendre dans les structures de santé pour être prise en charge. Mais fondamentalement la chaine de transmission ne peut être rompue que par les populations, même si le pharmacien peut jouer un grand rôle », a-t-il avancé.

Dr Malick Diop del’industrie pharmaceutique au comptoir

Dr Malick Diop est un produit de l’industrie pharmaceutique. Malgré sa formation, il a atterri en un moment de sa vie professionnelle derrière le comptoir en ouvrant lui-même son officine de pharmacie à Dakar. Une expérience qu’elle a vécue pendant plusieurs années avant d’embrasser d’autres challenges.  Pour Dr Diop : « J’ai toujours été un touche-à-tout. Et en tant que pharmacien, je dois exceller autant en biologie qu’en industrie pharma ou en officine. Et même au-delà, être un bon manager. Aujourd’hui je suis dans le cadre spécifique du commerce international. » Pour Dr Diop, tout est possible pour le pharmacien, quel que soit le domaine où il se trouve. Toutefois, il a avancé : « On constate pour s’en désoler que certains pensent que le rôle du pharmacien se limite à l’officine. Alors qu’il peut évoluer à tous les niveaux de l’économie d’un pays. Le pharmacien est bien formé, la profession structurée et avec une capacité à s’adapter quel que soit le secteur d’activité. »

Les blocages du développement del’industrie pharmaceutique

Dans les années 80, l’industrie pharmaceutique était bien partie au Sénégal. Il faisait parti des pays exportateurs de produits pharmaceutiques au niveau de la sous-région. Aujourd’hui, plusieurs des industries ont fermé et les nationaux qui investissent le milieu ont du mal à survivre. C’est le cas de parenthérus, une industrie pharmaceutique de fabrique de soluté implanté à Diender qui peine à sortir la tête de l’eau. Pour Docteur Malick Diop, à l’époque, « il y avait le Parke Davis et Sipoa qui étaientt là et qui produisaient toutes sortes de molécules, des spécialités et toutes les formes pharmaceutiques. Des comprimés en passant par les sachets et jusqu’aux préparations injectables. C’était un bon départ. Mais, il n’y a pas eu dans les années 1990 un booster pour que cette industrie puisse perdurer ». Et de poursuivre : « Si on avait suivi la même dynamique que celle des années 80, à cette heure on en serait à une trentaine d’industries, d’autant plus qu’au Maroc sur la même période on avait à peu près le même pourcentage d’industries locales. Aujourd’hui le Maroc est à 80% d’industrie locale. Cela veut dire que nous avons stagné et même reculé alors qu’à côté il y a eu une augmentation. Cela est dû au fait que dès le départ l’Etat n’a pas mis en place un système de facilitation pour que les industries puissent s’implanter au niveau local, ce qui permettrait un transfert de technologies. »

Le Pap2A à la rescousse de l’industrie pharmaceutique

Pour le Dr Malick Diop, le plan d’action prioritaire ajusté (PAP2A) lancé par le Chef de l’Etat Macky Sall est là pour booster le secteur industriel et en premier plan le domaine pharmaceutique. Selon lui, c’est déjà une bonne chose qu’il y ait une volonté politique de l’Etat du Sénégal de vouloir aller vers une autonomisation en termes de production pharmaceutique au niveau du Sénégal. « Cela nous permettra de régler le problème de rupture de médicaments qu’on retrouve souvent au sein des officines. Mais, également aux pharmaciens de se spécialiser dans l’industrie pharmaceutique », a-t-il déclaré. Si l’industrie pharmaceutique renaît, le docteur Malick Diop reste convaincu qu’il y aura des pharmaciens qui seront formés au laboratoire, au niveau de la production et de la recherche.

Réforme sur le capital de l’industrie pharmaceutique

Dans la mesure où il faut qu’il y ait des pharmaciens autour de la production pharmaceutique, Dr Malick Diop reste convaincu que le monopôle pharmaceutique est très important.  Sur les rumeurs d’une réforme qui voudrait annuler l’obligation de la détention de 51% du capital par les pharmaciens, Dr Diop se dit : « Je ne suis pas au courant de cette réforme ». Et de poursuivre : « Souvent, on dit qu’il faut laisser le soin aux grandes firmes d’investir parce que l’investissement ne doit pas exclusivement provenir des pharmaciens. Mais il faut qu’il y ait une partie importante en termes de majorité pour qu’il y ait des pharmaciens qui puissent contrôler la viabilité et la sécurité du médicament. »

Vision sur la profession de pharmacien

« Ce que j’ai beaucoup aimé dans la pharmacie c’est la précision », s’est dit fièrement le docteur Malick Diop. Toutefois, il a estimé qu’il y a une différence fondamentale entre le médecin et le pharmacien, en ce sens que le médecin a l’obligation de moyen et le pharmacien de résultat. Une obligation qui leur amène à être très précis dans tout ce qu’ils font. « Quel que soit le domaine d’intervention du pharmacien, il est très précis dans ce qu’il fait », a-t-il ajouté. Par contre, il voudrait qu’on améliore la solidarité professionnelle, d’autant plus que le métier de pharmacien est une profession de qualité. « Chacun là où il est, doit faire un plaidoyer pour que la profession soit à même de régler les problèmes sanitaires des populations. »

Malick Diop, Dg de l’Asepex

L’Asepex est une structure de l’Etat du Sénégal adossée à la direction du secteur parapublic. Elle est aussi une structure publique autonome à fonctionnement parapublique parce que les agents qui sont au niveau de l’Asepex ne sont pas des fonctionnaires. Pour Dr Malick Diop directeur général de cette institution, la moitié des leviers économiques du Sénégal à savoir les exportations est gérée par l’Asepex qui a donc pour mission de mettre en œuvre les politiques publiques qui sont adossées au Plan Sénégal émergent (Pse). « Quand on a des politiques publiques liées à des plans stratégiques de développement, il faut qu’on ait des structures qui le déroulent. C’est l’Apix qui développe la partie des investissements et l’Asepex l’exportation. Nos secteurs d’activités demeurent  la production agricole (agriculture, élevage, horticulture), la pêche, la cosmétologie naturelle, l’artisanat, les Tic et télé services, tourisme, santé, éducation », a-t-il renseigné. Et d’avancer : « L’Asepex améliore l’offre exportable sénégalaise en allant dans les 45 départements du pays pour appuyer les producteurs sénégalais à produire en quantité et en qualité suffisante. Après la production, on améliore l’offre en termes d’emballage, de normes de production. Le Sénégal a signé des conventions avec un marché de 3 milliards au niveau extérieur qui sont suivies par l’Asepex. le certificat d’origine est le passeport, le visa du produit et seul l’Asepex est habilité à le délivrer et ledit certificat permet de lever la douane étrangère. »

Le Sénégal au cœur du salon pharmagora

« On a beaucoup travaillé sur pharmagora, un salon international pour les pharmaciens. Nous avons acheté un pavillon sénégalais. C’est pour faire la promotion de la pharmacie sénégalaise. Avec l’ordre des pharmaciens, on a sélectionné des entreprises qui étaient dans la cosmétologie et on a positionné deux produits qui sont le beurre de karité et l’huile de baobab. Nous avons donc sélectionné des entreprises qui ont exposé pendant 2 ans mais avec l’avènement de la Covid, les salons ont été arrêtés et aujourd’hui le Sénégal est le seul pays africain positionné pavillon Sénégal au cœur de pharmagora », a déclaré Dr Diop.

AÏSSATOU DIOP

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